Ostia, ville miracle

Publié le par Mimine

Dimanche 3 juin 2007   Ostia Antiqua
 
Il y a des journées de grâce dans ce monde de brutes. Aujourd’hui, la muse Clio s’est posée sur moi et je me suis laissée faire.
Mon Guide Du Retour m’avait ( personnellement ) conseillé de visiter Ostia ( Antiqua) : « Pas un séjour de plus de 4 jours à Rome sans aller à Ostia ». Les infos pour y aller me paraissaient pas très sures, je me suis renseignée à l’AJ et les infos correspondaient avec celle du GDR ( Bible), alors je me suis dit OK, lance toi.
En fait, rien de bien compliqué. On peut même dire très simple, efficace et pas cher du tout ( 2 euros AR) puisqu’on continue à utiliser pour ce train de banlieue un peu miteux le billet de métro déjà poinçonné entre Termini et Piramide.
Vingt six minutes pour s’éloigner de la capitale et pour rejoindre la première citée fondée par Rome, il y a plus ou moins 2600 ans. A l’époque, et jusqu’à son déclin au IV ap. JC ( et son abandon définitif au X°s), Ostie était le port de Rome sur le Tibre. La mer s’étendait alors jusqu’à ses murs mais le sable l’a repoussée au fil des siècles et elle est maintenant à 5km de la ville.
L’Urbs, riche, commerçante, active, ouverte sur tout l’empire, a connu son heure de gloire aux Iers siècles avant et après JC. La plupart des monuments que l’on peut y voir date de cette époque, au moins pour ceux du « centre ville », autour du forum où se croisent les 2 voies principales.
En sortant de la gare, il faut passer la passerelle, continuer dans une rue goudronnée, tourner à droite et marcher sur 300m. Là, l’accueil me fait entrer gratuitement parce que je suis étudiante en ‘Storia’. On passe une petite grille et on oublie la Révolution Industrielle, Louis XIV, l’existence de l’Amérique, les abbayes cisterciennes, l’empire carolingien, Clovis et la chute de Rome. On vient de perdre 2000 ans.
On rentre dans la magnifique Ostia si bien conservée ( le mot est faible) par l’entrée utilisée à l’époque romaine, la Via Ostense. Le long de cette voie d’accès à la ville, on trouve les tombeaux des morts comme préambules à leur ville. Dans l’antiquité, on enterrait les morts le long des routes. Des fois des urnes funéraires, des fois des sarcophages en pierre, toujours émouvants. 
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Puis on passe la porte Romana et là c’est la vraie folie qui commence avec des d’immenses et magnifiques mosaïques complètement découvertes dans les termes – dont les murs sont toujours debout – et la caserne des agents de police. Les termes de Neptune sont dans un état superbe. On comprend tout, d’un point de vue un peu en hauteur, de l’enchaînement des chambres – piscine chaude, tiède puis froide – de la palestre au centre avec ses colonnes où on faisait de la gym après s’être lavé… Il manque seulement les baigneurs mais on devine presque leurs ombres.
De là, tout s’enchaîne : le théâtre avec sa cavea intacte ( les gradins) et une belle esquisse du mur de fond de scène en marbre. Derrière, sur la place du marché, on voit les emplacements des différentes corporations, chaque boutique avec un portique soutenu par des colonnes qui devait supporter des draps pour protéger vendeurs et acheteurs du soleil ( aujourd’hui, il pleut). Au sol, encore de très belles mosaïques noires et blanches qui évoquaient sans doute l’activité du lieu car on y voit en grande quantité des bateaux et des poissons.
 

The lighthouse, two ships and a dolphin (B. Storage - L. Maish)


Un peu plus loin, une belle maison de notables et juste derrière, un petit temple de Mithra, une divinité très présente dans la ville. Concurrent du Christianisme, ce culte d’un Dieu unique a eu beaucoup de fidèle dans les premiers siècles du notre ère avant de disparaître. Cette pièce toute simple mais chargée de symboles m’a profondément émue.
Et de là, tout est permis : maisons, temples républicains, quartiers des boulangers avec des fours encore visibles et surtout, partout de cette vaste pelouse émergent des mosaïques, des peintures murales, des symboles religieux, des sols de marbres multicolores, tant de signes de la vie humaine antique.
Il pleut et je suis souvent la seule à marcher d’une maison à l’autre, à admirer une arche, un sol, une statue, un dessin religieux, c’est magique.
Rendue là, je me demande si vous comprenez bien. Imaginez Pompéi mais qui ne serait pas morte d’un coup, qui aurait lentement décliné. Certains quartiers ont été abandonné, puis de plus en plus et les derniers habitants sont partis au X°s, quand l’Italie a connu un tout nouveau genre d’organisation sociale ( regroupement autour de châteaux seigneuriaux, sur des zones perchées et non plus en ville). Les campagnes ont été abandonnées, la végétation a repris ses droits. L’herbe, l’humus, ont tout recouvert. On a oublié qu’autrefois des gens vivaient là. Et puis la science historique du XXe a repéré dans les textes des mentions de cette riche et puissante Ostia. On en a déduit la position géographique. On a lancé des fouilles. Arraché de la terre des bâtiments par centaines, toute la structure sociale de la vie à l’époque romaine. On a retrouvé les sols, les murs, les élévations, les monuments publics et privés, religieux, de spectacle, de commerce, de détente… Une ville entière est sortie de terre, et le travail n’est pas encore achevé. Loin de là. Sur le côté ouest de la ville, beaucoup de choses restent à découvrir. Un talus sert pour le moment de limites temporaires à la ville.
 

Streets in Ostia (B. Storage - L. Maish)

Demain, la suite…

Publié dans Carnets de voyages

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